L’Institut Curie, 1er centre de lutte français contre le cancer, est pionnier dans l’offre d’activité physique adaptée (APA) depuis 13 ans et poursuit sa démarche en développant son dispositif dédié : sensibilisation précoce des patients atteints de cancer, formation des oncologues, bilan personnalisé, programme nutritionnel et évaluation des bienfaits de l’APA.
« L’Institut Curie est pionnier dans le déploiement de l’APA en France comme thérapeutique non médicamenteuse, souligne le Pr Steven Le Gouill, directeur de l’Ensemble hospitalier de l’Institut Curie. Depuis 2011, ce sont près de 3 000 patients de l’Institut Curie qui ont bénéficié d’un programme d’activité physique. Les bénéfices de l’APA sont clairs, que ce soit en prévention primaire avec une diminution du risque de survenue de certains cancers, ou en prévention secondaire avec une réduction du taux de rechute. A l’avenir, nous souhaitons aller encore plus loin en étoffant et en structurant nos actions pour sensibiliser et inciter toujours plus de patients à s’inscrire dans cette démarche. »
« La qualité de vie de nos patients est une priorité, la prévention des rechutes également et nous souhaitons les aider le plus possible à adopter les meilleurs comportements », précise la Pre Carole Bouleuc, cheffe du département de soins de support.
A retenir :
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Sensibiliser toujours plus les patients
« La sensibilisation des patients le plus précocement possible est un des points phares du dispositif, explique la Pre Carole Bouleuc. Ils sont encore trop nombreux à ne pas savoir que l’activité physique est bénéfique pour eux, pendant et après les traitements. Cela leur permet de mieux tolérer les traitements (diminution des effets secondaires, analgésie des douleurs neuropathiques ou articulaires…), cela réduit d’environ 25 % le niveau de fatigue. Seule thérapeutique non médicamenteuse aujourd’hui reconnue, l’activité physique améliore le sommeil et a un bon impact émotionnel et psychologique. Elle permet aussi de réduire le stress, d’améliorer la concentration et les fonctions cognitives, et de prévenir surpoids et obésité. »
Deux postes d’enseignant APA ont récemment été créés pour renforcer la proximité avec les malades. « Nous faisons entrer un professionnel du sport dans l’univers du soin, c’est assez inédit » souligne la Pre Carole Bouleuc.
Pour compléter cette approche, des conférences en ligne et sur les sites hospitaliers (Paris et Saint-Cloud) sont organisées pour informer les patients des bienfaits de l’APA et de son utilité dans la prise en charge des cancers. Un livret d’information sur l’APA est également disponible en ligne et sous format papier.
Enfin, en interne des formations sont proposées aux oncologues pour qu’ils puissent plus facilement orienter leurs patients et leur prescrire des séances d’APA.
Accompagner les patients pendant et après les traitements
Au cœur du dispositif, une plate-forme dédiée à l’APA accueille, informe les patients et évalue leurs besoins. Certains peuvent ensuite choisir de s’orienter vers des activités extérieures. Pour d’autres c’est le programme Starter qui est proposé, en présentiel et désormais en digital, pour donner accès à un maximum de patients où qu’ils soient et même quand ils ont des difficultés pour se déplacer.
Ce programme comprend un bilan initial, 10 séances d’APA et un bilan final. Le programme digital est identique au présentiel (bilans et cours en visio). En 2023, près de 700 patients ont bénéficié de ce dispositif.
Membre à part entière de l’équipe soignante, l’enseignant APA dédié assure la coordination des partenariats et facilite la mise en place des parcours APA qui sont personnalisés selon la situation des patients grâce aux bilans.
Plusieurs associations sont partenaires du dispositif (Cami, UCPA, Rosamouv, EPGV, Siel Bleu…) et proposent des activités variées (rugby, escrime, marche nordique…).
Une nouvelle étape avec le développement de la nutrition
Un hôpital de jour de soins de support dédié à l’APA et à la nutrition permet d’accueillir des patients souffrant de cancers thoraciques ou digestifs, métastatiques, en cours de traitement qui sont adressés par leur oncologue. « Ce parcours ambulatoire permet de réaliser une évaluation globale du patient et de lui proposer un suivi personnalisé avec différents intervenants : un médecin de soins de support, une diététicienne, un enseignant APA et au besoin un kinésithérapeute. Il s’agit d’éviter la perte de poids, de guider le patient vers de meilleurs comportements afin de l’aider à mieux supporter les traitements et à améliorer sa qualité de vie », explique le Dr Timothée Marchal, médecin de soins de support spécialisé en nutrition, référent médical de la plate-forme APA.
Un programme nutritionnel spécifique est par ailleurs proposé aux patients atteints de cancers ORL du diagnostic à la fin des traitements.
« Ces patients doivent subir des traitements lourds (association de chimiothérapie et radiothérapie) et ne peuvent pas s’alimenter normalement pendant parfois plusieurs semaines. Notre rôle est de les accompagner au plus près de leurs besoins, souligne le Dr Timothée Marchal. Ce parcours spécifique et pluridisciplinaire intègre notamment une évaluation par un médecin de soins de support, un kinésithérapeute (mastication, déglutition), une diététicienne nutritionniste, un enseignant APA. Il est principalement orienté sur la nutrition, mais prévoit un bilan APA en amont et en aval de la prise en charge thérapeutique. »
Un autre programme pilote (de pré-habilitation) dédié aux patients atteints de cancer digestifs opérables (pancréas et œsogastriques) associant nutrition et APA est également est en cours de déploiement. Ces patients bénéficient avant et après la chirurgie d’un suivi nutritionnel hebdomadaire et de l’APA trois fois par semaine.
A noter que l’Institut Curie coordonne également depuis 1 an une étude clinique à l’échelle nationale : Proactiv’. Celle-ci vise à évaluer les bienfaits d’un suivi très rapproché associant APA et nutrition, au domicile de 270 patients avec des cancers métastatiques digestifs et thoraciques au cours de leurs traitements.[1]
« Derrière tous ces parcours dédiés, il y a la notion de médecine préventive. Pouvoir agir précocement, c’est faire en sorte que les patients récupèrent mieux, plus vite, qu’il y ait moins de complications… et dans cette prise en charge, l’APA, la nutrition et les soins de support sont de véritables piliers », précise le Dr Timothée Marchal.
ZOOM sur
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[1] Cette étude fait suite aux résultats présentés à l’ASCO en 2022 par la Pr Cindy Neuzillet sur les bénéfices de l’APA chez des patients atteints de cancer du pancréas avancé.